Clarisse Magnin-Mallez – Directrice associée senior
& Directrice générale de Mckinsey en France
C’est une responsabilité et une opportunité pour chaque entreprise que de créer un environnement propice à l’avancement de carrière des femmes et leur épanouissement.
Le sujet de l’égalité femme-homme est un sujet de société mais aussi un sujet de performance des organisations. Dès 2007, le bureau français de McKinsey a été l’initiateur, à l’échelle mondiale, des recherches « Women Matter ». Celles-ci ont établi une corrélation positive entre la parité au sein des directions générales et la performance financière et organisationnelle des entreprises. Nous avons ainsi pu estimer qu’en moyenne, les organisations situées dans le 1er quartile en termes de diversité de genres ont 55 % de chances de voir leur rentabilité dépasser la médiane nationale de leur secteur. Cette performance ne résulte pas du simple fait de compter des femmes à des postes de direction, mais de la complémentarité des styles de leadership féminins et masculins. Nous avons collectivement un rôle à jouer pour faire perdurer ces valeurs et convictions d’égalité au sein des organisations et de la société au sens large.
La parité n’est pas un combat purement féminin, par les femmes et pour les femmes, mais concerne tout le monde. Les hommes aussi doivent s’engager, et ils le souhaitent de plus en plus. Dans mon rôle de Directrice générale du bureau français de McKinsey, je suis en effet heureuse de constater que de plus en plus de collaborateurs hommes s’emparent de ce sujet. L’égalité femme-homme ne deviendra une réalité que si nous parvenons à mutualiser tous les efforts. Je le constate chaque jour à l’échelle de mon entreprise.
Par exemple, la question de la parentalité, initialement plutôt portée par les femmes, est aujourd’hui saisie par l’ensemble de nos collaborateurs. Elle s’est bien sûr accompagnée d’une prise de conscience accrue du rôle du père ou second parent, qui a désormais une place indéniable au sein du foyer et dans l’éducation des enfants. Chez McKinsey France, l’allongement du congé « paternité ou second parent » leur permet d’accompagner leur conjointe et ainsi de partager la charge mentale et physique consécutive à l’arrivée d’un enfant. Il me semble que la prise de conscience générationnelle doit être accompagnée par des évolutions dédiées au sein des entreprises.
Il est également de la responsabilité de chaque entreprise de créer un environnement propice à l’avancement de carrière des femmes et leur épanouissement. Cela peut se traduire par le développement de programmes de mentoring, l’égalité salariale, l’identification des talents féminins systématiques dans les processus de nomination. Cela passe aussi par la lutte contre les biais inconscients qui doit rester une obsession des managers : la contestation des préjugés, des stéréotypes et de la discrimination doit être au cœur des préoccupations quotidiennes. Enfin, chaque organisation doit prendre le temps de mesurer ses progrès en la matière et de célébrer la force et la fierté que constitue le fait d’avoir des équipes mixtes. Il est capital d’embarquer les hommes sur l’ensemble de ces dimensions.
A titre personnel, je mets un point d’honneur à favoriser le développement professionnel de mes collaboratrices. J’encourage donc tous les engagements individuels et collectifs qui vont dans ce sens, à l’instar de l’initiative « Women » de McKinsey. Celle-ci a pour ambition d’accompagner le développement du leadership des personnes se considérant comme femme au sein de notre cabinet, ainsi que d’engager les femmes et les hommes dans l’évolution des états d’esprit sur ces sujets.
Il ne faut cependant pas oublier les biais que peuvent encore avoir certaines femmes, en dépit de leurs capacités ou même de leur envie de réussir et continuer à les encourager à affirmer la légitimité de leurs ambitions, sans se mettre de contraintes. Sur ce point, nos études sont sans appel : elles montrent que l’ambition déclarée par les femmes est aussi élevée que celle des hommes (à 2 points près) ; en revanche, leur confiance est 17 à 18 points plus faible que celle des hommes dans la capacité à réussir à atteindre leur ambition dans leur organisation.
Je crois fermement dans la vertu de tout ce qui peut contribuer au leadership féminin. En ce qui me concerne, le développement de ma carrière s’est toujours fait « avec » et en aucun cas « contre » les hommes. Mon entourage personnel et professionnel, notamment composé d’hommes, a été d’un soutien très précieux pour m’affirmer en tant que leader. Il ne faut pas non plus négliger le rôle joué par certains modèles de femmes dont les réussites contribuent à inspirer les autres femmes et à leur montrer la voie.
En tant que femme, dirigeante, et mère de 4 enfants, la question de l’égalité femme-homme m’est chère. Elle réfère à mon propre parcours et je tâche de retransmettre chaque jour l’impérieuse nécessité de ce combat, qui n’est pas un idéal mais une réalité en devenir, que ce soit à mes client(e)s, mes collaboratrices et mes collaborateurs, aux femmes et aux hommes que je rencontre, et bien sûr à mes filles et mes fils.
À propos de Clarisse Magnin-Mallez :
Clarisse Magnin-Mallez est directrice associée senior de McKinsey et directrice générale du bureau français.
Parmi les leaders à l’échelle mondiale du pôle d’activités Consumer, elle accompagne des acteurs mondiaux des biens de grande consommation, de la distribution, du luxe et de la mode, ainsi que de l’agriculture. Elle intervient sur leurs grands projets de croissance organique ou externe, de transformation d’envergure alliant innovation, nouveaux modèles économiques et d’engagement client, transition technologique, environnementale et humaine. Elle a été responsable pour la zone EMEA (Europe, Moyen-Orient et Afrique) du pôle Consumer et a été co-leader au niveau européen du pôle Private Equity dans les secteurs de la consommation. Elle a également créé et dirige le pôle Agriculture en France.
Experte des enjeux de sustainability, dont elle est l’une des cheffes de file au sein du cabinet, et de création de valeur par les activités durables, Clarisse Magnin-Mallez dirige le pôle Economie Circulaire du cabinet au niveau mondial et accompagne des entreprises pionnières en la matière. Elle est coauteure de plusieurs publications sur les thèmes du plastique, du gaspillage, de la transition alimentaire et de l’apport de l’intelligence artificielle aux nouveaux modèles d’économie circulaire. Elle intervient régulièrement sur ces sujets dans le cadre de forums internationaux, dont le WEF de Davos et les Rencontres Economiques d’Aix. Elle est également membre du comité de direction du McKinsey Global Institute (MGI).
Par ailleurs, elle co-pilote les recherches de McKinsey sur l’entreprise du futur dans une économie du savoir. Passionnée par les sujets d’emploi et de requalification du capital humain, elle a co-fondé et présidé Generation France, une organisation à but non lucratif qui développe des programmes de formation permettant à des jeunes éloignés du marché du travail d’occuper des emplois que les entreprises peinent à pourvoir. Très impliquée dans les sujets de méritocratie et de diversité, elle a aussi initié des actions en ce sens (diversité de genre, diversité d’origine, LGBTQ+, handicap).
Entre 2018 et 2021, elle a été membre du Comité exécutif mondial de McKinsey, où elle était en charge des Client Services et « Action Officer » de notre Board. Avant de rejoindre le bureau de Paris, elle a travaillé au sein des bureaux de Boston et de New Jersey.
Clarisse Magnin-Mallez est diplômée de HEC et titulaire d’un DEA d’Economie de l’Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne.