Olena Kushakovska – Directrice Générale de SAP Labs France
& Co-dirigeante du conseil industriel pour la recherche en IA (ICAIR)
« Lorsque naissent les possibilités, ne détournez pas le regard par peur du changement ou du jugement, nourrissez-vous des rencontres, prenez l’énergie là où elle est que ce soit en vous, ou chez les autres, il faut se saisir des chances qui s’offrent. Toujours. »
Au début de mes études, je ne savais pas quel métier je voulais exercer mais j’étais bonne en maths et je baignais dans l’univers des sciences dures. Mon père était ingénieur en électronique en Ukraine et a travaillé au sein du premier Institut de la Recherche en Cybernétique. Un professeur m’a encouragée à entrer dans une école spécialisée en Maths et Physique. J’étais très stressée quand j’ai passé les épreuves de recrutement mais l’examinatrice a cru en moi.
Après cela, je suis entrée à l’Université de Kiev pour poursuivre mon cursus en Maths Appliquées. J’avais fait ce choix car ce qui m’intéressait c’était de travailler sur des vrais cas d’usage. A l’époque on était à peu de choses près le seul département à travailler sur des ordinateurs mais il n’y avait pas de compilateurs en ligne, qui sont arrivés pendant ma dernière année : il fallait attendre le résultat de ses calculs plusieurs jours ! Je suis sortie première de ma promotion et ai reçu plusieurs offres d’emploi mais qui ne m’inspiraient pas vraiment alors j’ai pris la décision de démarrer une thèse sur la théorie de l’optimisation, que j’ai poursuivie au Royaume-Uni : on m’a en effet proposé de rejoindre l’Imperial College of London un an après le début de ma thèse. C’était une opportunité fantastique d’autant qu’à ce moment-là l’Ukraine subissait des désordres économiques et politiques qui rendaient le pays instable.
Pendant la dernière année de ma thèse, j’ai partagé ma vie entre l’Angleterre et la France, pays de mon mari. Nous avons déménagé en France et j’ai pris des cours par correspondance sur le Computing for Commerce & Industry car je sentais que le marché du logiciel était prometteur. Pour autant, trouver du travail n’a pas été évident : pour la plupart des recruteurs, je ne parlais pas assez bien le français. J’ai été embauchée par SAP en 2000 qui venait de lancer son laboratoire dans le sud de la France (NDLR : SAP Labs France a ouvert en août 1998 à Mougins). J’ai passé 4 mois en Allemagne pour me former et me spécialiser. Je revenais en France chaque week-end, c’était intense ! Après une dizaine d’années à évoluer dans le développement logiciel jusqu’au poste de manager, j’ai ressenti l’envie de porter de nouveaux projets. Je me suis alors rapprochée d’Hanno Klausmeier (NDLR : Président de SAP Labs France) à qui j’ai offert de prendre des responsabilités au sein de SAP Labs France, et qui m’a fait confiance. Avec l’expérience, j’ai compris qu’il faut exprimer ses envies, ses attentes. Si j’ai un conseil à donner, c’est d’oser s’exprimer car un défaut que l’on observe, particulièrement chez les femmes, c’est de croire que parce qu’on travaille bien, qu’on se comporte bien, un jour quelqu’un va arriver pour vous proposer quelque chose : ça arrive rarement !
Je suis habituée à évoluer dans un univers dit « masculin » – l’informatique en France se (re)féminise et c’est tant mieux ! – et je tends à adopter des comportements qui sont plus souvent considérés comme l’apanage des messieurs. Par exemple, je suis tenace et je ne me vexe pas facilement quand on me fait des réflexions. Surtout, j’ai appris qu’il faut arrêter de se poser des questions : si je suis promue, est-ce que c’est parce que je suis une femme ? Suis-je légitime ? Stop ! Les hommes ne se posent pas toutes ces questions !
La première personne qui m’ait inspiré est ma grand-mère. Sa vie était rude mais elle ne s’est jamais plainte. Elle ne manquait pas de caractère et dans toutes les situations, elle réussissait à s’en sortir avec dignité. Il est indéniable que c’est un trait de caractère que j’apprécie retrouver en moi lorsque je dois faire face à des troubles dans ma vie professionnelle comme personnelle.
Je crois qu’il est important d’oser exprimer son opinion. Et il faut savoir accepter l’échec : il fait partie de tout parcours et l’important est d’apprendre de ses erreurs. Il ne faut pas tergiverser et s’empêcher sous prétexte qu’on est une femme.
À propos d’Olena Kushakovska :
Olena Kushakovska est Directrice Générale de SAP Labs France. En plus de ses responsabilités en tant que DG, elle gère à Sophia-Antipolis l’engagement de SAP autour de l’Intelligence Artificielle, notamment sa contribution au conseil industriel pour la recherche en intelligence artificielle (ICAIR). Olena dirige également au sein même de SAP Labs France une équipe travaillant sur l’automatisation des services d’intelligence artificielle. Elle est diplômée de l’Université de Kiev en mathématiques appliquées, spécialisée en cybernétique, et a validé une thèse en théorie de l’optimisation à la prestigieuse université Imperial College de Londres.