Ariane Abitbol, commandant de police à la direction centrale de la sécurité publique à Paris
BIOGRAPHIE
Ariane ABITBOL est née le 27 octobre 1973 à Casablanca au Maroc et est commandant de police à la direction centrale de la sécurité publique à Paris.
TRIBUNE
« Ne laissez rien d’autre que votre vérité intérieure la plus absolue vous obliger en ce monde. »
Emma Herwegh, écrivaine allemande.
Encore un 8 mars ! et encore une nouvelle célébration des droits des femmes en France, en 2022 !
C’est bien de consacrer une journée à fêter l’avancée des droits des femmes mais je continue à penser que le jour où nous n’aurons plus à commémorer des droits, un grand pas aura été fait, pour toutes et pour tous.
Moi qui suis éperdument attachée à l’égalité de tous les êtres humains, quelque soit leur genre, leur sexe, leur origine, leur religion, leur opinion politique ou leur orientation sexuelle … commémorer une journée des droits d’un « sexe » reste symboliquement un non-sens…
Ma philosophie humaniste m’empêche de considérer qu’il faille encore défendre en 2022 la femme pour qu’elle puisse avoir les mêmes droits que l’homme ; alors que femme ou homme, qui sommes nous ? sinon, un cœur en mouvement avec le même sang rouge qui coule dans nos veines …
Évidemment, j’écris ceci au mois de février 2022 alors que je suis née dans les années 70 et alors même que je n’ai jamais eu à subir ce que les anciennes générations de femmes ont eu à subir.
Je n’ai jamais été sous la tutelle d’un homme, j’ai toujours eu le droit de vote, j’ai pu accéder aux concours de la fonction publique, j’ai toujours perçu un salaire professionnellement équivalent à celui d’un homme, je n’ai jamais été sous la dépendance matérielle d’un homme, je n’ai jamais subi de discrimination liée à mon sexe, bref …. j’ai toujours eu les mêmes droits que les hommes et j’ai toujours été libre.
Ainsi, facile, me direz vous, de considérer que cette journée puisse être « contre nature » !
J’aimerais que les droits des femmes soient une fête quotidienne au même titre que ceux des hommes mais que ces droits féminins ne viennent pas annihiler ceux des hommes qui ont tendance, de plus en plus aujourd’hui, à se sentir bridés, rabaissés voire émasculés.
Que la revendication de droits ne viennent pas débâtir ceux des autres et que tous puissent être côte à côte.
J’aimerais que l’homme reste un homme et que la femme soit un homme comme les autres ; que la femme reste une femme et que l’homme soit une femme comme les autres. Bref, pas de genre, pas de sexe dans le droit et la justice, juste des humains !
La vraie République selon moi devrait être « Aux hommes leurs droits et rien de plus, aux femmes, leurs droits et rien de moins. » (Susan Anthony) et qu’on n’ait plus à le revendiquer, à le souligner, à le préciser, à insister ou, encore et toujours, à se justifier!
Alors évidemment, la tragédie qui demeure encore aujourd’hui sont les violences faites aux femmes, physiques ou psychologiques et celles qui mènent à la mort ; 113 féminicides en 2021, 102 en 2020, 156 en 2019 … terrible !
Est-ce le résultat d’une communication plus intensive sur le sujet ou est-ce le résultat d’une société de plus en plus violente ? Un peu des deux, je crois, et en tout cas, un constat que la violence a explosé et s’est banalisée dans notre société.
Car elle a explosé en France depuis ces 30 dernières années.
Lutter contre toute cette violence doit être notre combat commun, autant que la violence faite aux hommes par d’autres hommes ou par des femmes!
Notre société a revendiqué (tous sexes confondus) beaucoup de droits depuis 40 ans, c’est bien ! Mais on en a oublié les devoirs, l’éducation, le respect, l’élégance, la galanterie, l’entraide … Il faut recréer d’urgence une culture des devoirs et du respect !
Les mêmes droits pour tous mais aussi les mêmes devoirs pour tous !
C’est mon souhait le plus cher pour les années qui viennent ! et nous sommes toutes et tous, femmes comme hommes, embarqués dans le même navire ! Nous devons voyager ensemble !
Les femmes doivent se montrer toujours et encore plus fortes, sans avoir à se défendre pour ça, croire en elles, agir en conscience comme n’importe quel homme et ne jamais laisser personne considérer qu’elles puissent être inférieures en droit, par rapport à leur sexe ou à leur statut !
A chacune d’être un exemple à suivre, d’abord pour elle-même et ensuite pour les autres : « Quand on ne peut pas être une puissance, on peut être un exemple » Albert Camus !
A chacune de montrer le chemin, de croire en leur destin, et en leur force vive pour que l’on n’ait définitivement plus à se démener pour le justifier en commémorant une journée dans l’année!
Vous êtes toutes belles ! Et vous êtes plus fortes que vous ne le pensez !
Le voyage commence maintenant !
En avant toutes !
Sororalement et solidairement
Ariane Abitbol